Fondée au XIIe siècle, l’abbaye de Bon-Repos a traversé de nombreuses périodes d’opulence et de crises, auxquelles la Révolution française a mis un point final. Elle tombe alors peu à peu en désuétude, jusqu’à la création en 1986 de l’association des Compagnons de l’abbaye de Bon-Repos qui va lui rendre sa majesté d’autrefois.
1184-1789 : de la fondation à la Révolution française
L’histoire de l’abbaye de Bon-Repos remonte à 1184, lorsque le Vicomte Alain III de Rohan décide d’implanter sur ses terres, sa nécropole familiale. La légende raconte qu’après une chasse harassante, le Vicomte Alain III de Rohan serait arrivé dans une vallée à la lisière de la forêt de Quénécan. Épuisé, il tombe dans un sommeil profond. La vierge Marie lui serait apparue en songe lui inspirant l’idée de fonder le lieu de son repos éternel. Sans plus attendre, le Vicomte et son épouse Constance de Bretagne, signent le 23 juin 1184, l’acte de fondation de l’abbaye sous le patronyme de Notre-Dame de Bon-Repos. L’église abbatiale de l’abbaye de Bon-Repos devient alors la nécropole de la famille De Rohan, de 1196 jusqu’à 1516, date à laquelle ils se tournent vers le protestantisme.
Conformément à la tradition cistercienne, un abbé et 12 moines arrivent de l’abbaye de Savigny-le-Vieux dans la Manche, et s’installent dans cette vallée. Dans ce monastère à vocation agricole, isolé du reste du monde, le quotidien des moines se résume à la prière et au travail de la terre. La communauté bénéficie d’un environnement propice, à proximité du Blavet, de la forêt de Quénécan et de terres cultivables.
L’histoire de Bon-Repos est toutefois marquée par une forte opulence de la communauté suite aux nombreuses donations dont bénéficient les moines. Cela va entraîner un relâchement de leur part, au cours du XIVe siècle. Les cisterciens de Bon-Repos se détournent alors de la règle de Saint-Benoît et s’adonnent à des activités qui leur sont interdites. Sur décision de l’abbé Nicolas de Cîteaux, l’abbaye est mise en 1387 sous la tutelle de ses consœurs, l’abbaye de Boquen, à Plénée-Jugon et l’abbaye de Coatmalouen, à Kerpert.
Tout au long du XVe siècle, l’abbaye traverse des périodes difficiles. Elle est réformée, sujette à des investigations concernant la gestion du domaine. L’abbaye Notre-Dame de Bon-Repos est aujourd’hui caractérisée par cette façade monumentale, née de l’ambition d’un abbé commendataire, Philippe Alexandre Montault Navailles de Saint-Geniès. À son arrivée à la tête de la communauté en 1683, il souhaite que l’abbaye soit représentative de ses ambitions, de son pouvoir et de son prestige. Un véritable palais abbatial est alors érigé, tandis que l’ensemble du monument, excepté l’église abbatiale, est totalement remanié. On peut voir encore aujourd’hui, de nombreuses pierres de réemploi, issues de l’édifice initial, constituer les murs de l’abbaye. Ainsi, seuls trois murs du Moyen-âge subsistent et témoignent d’un tout autre style architectural.
1789-1974 : un abandon progressif
Alors que la Révolution éclate en 1789, le décret du 2 novembre de cette même année met tous les biens du clergé, à la disposition de la Nation. En 1791, le monument est vendu aux enchères comme bien national tandis que le mobilier est dispersé dans les communes et paroisses avoisinantes. Rapidement, Julien Le Bris, fier “ sans-culotte ”, rachète le bâtiment à son propriétaire. Il y installe une manufacture de chemises de lin jusqu’en 1795. Son activité est rapidement mise à mal par les Chouans, présents dans la forêt de Quénécan, qui pillent à plusieurs reprises la fabrique, pour finalement s’y installer jusqu’en 1800.
En 1818, à la mort de son père, la fille Le Bris commence à vendre les pierres de l’édifice, “ un franc la charretée ”. L’église est ainsi démantelée tandis que son clocher, ajouté au XVIIIe siècle, est démonté puis remonté sur l’église paroissiale de Saint-Mayeux. L’abbaye est rachetée par le baron de Janzé en 1857. Un monument que ses héritiers vont garder en leur possession jusqu’en 2014.
De 1974 à aujourd’hui : la belle endormie
Disparaissant sous la végétation, le monument s’effondre petit à petit et laisse place à un bois à travers lequel l’on peut distinguer une ruine. C’est sous l’impulsion de quelques locaux que le 12 mars 1986, l’association des Compagnons de l’abbaye de Bon-Repos va voir le jour. La signature d’un bail emphytéotique avec les propriétaires du monument, la famille Le Cour-Grandmaison, va laisser à l’association la gestion du bâti. Après trois années de nettoyage du site, auquel ont participé de nombreux locaux, chantiers de jeunes ou encore scouts, une étude de faisabilité est réalisée en 1989.
L’attribution de fonds publics et privés va alors permettre de débuter les travaux de restauration. L’initiative est d’ailleurs récompensée en 1988 par l’obtention du second prix des “ chefs-d’œuvre en péril ”, décerné par le ministre de la Culture de l’époque, Jack Lang.
Laissée à l’abandon après la dernière occupation humaine par les ingénieurs du Canal de Nantes à Brest en 1832, l’abbaye, inscrite au titre des Monuments Historiques depuis 1940, connaît sa renaissance impulsée par cette association dont les missions sont la sauvegarde, la protection, la restauration et l’animation du monument. Les présidents successifs vont tour à tour laisser leurs empreintes tant sur le monument qu’en terme d’animations, impulsées depuis 2001 à travers des visites, des résidences d’artistes avec la population locale, des expositions, des ateliers pédagogiques à destination des scolaires. Née en 1987, l’association Racines d’Argoat propose quant-à-elle un spectacle son & lumière, dont la notoriété n’en finit pas de grandir. Cet été, pour fêter le 30e anniversaire, un nouveau spectacle sera même présenté au public.
Le rachat de l’abbaye de Bon-Repos et près de 40 hectares en 2014 par le conseil départemental des Côtes d’Armor a initié une nouvelle dynamique au sein de l’association qui permet aujourd’hui, de continuer à développer les expositions, la pédagogie, l’art contemporain et le numérique, déjà initiés depuis quelques années par l’association.