De son glorieux passé aux XIVe et XVe siècles, il ne restait plus guère qu’un site presque totalement recouvert par la végétation. Depuis dix ans, une association de bénévoles a choisi de faire revivre un site important du patrimoine médiéval : le château de La Chèze.
Né au début du XIIe siècle et mort vers 1180, c’est Eudon II, vicomte de Porhoët, qui fait édifier un premier château sur un massif isolé en schiste surplombant la vallée du Lié, à La Chèze. Mais, c’est vraisemblablement son fils, Eudon III qui fait construire l’actuel château, entre la fin du XIIe et le début du XIIIe siècle. Situé en bordure d’une route importante à l’époque et reliant Loudéac à Josselin, il disposait de défenses naturelles qui en faisaient une place forte imprenable. La façade principale de ce château de forme hexagonale était tournée vers l’Est. Il était flanqué de huit tours massives et entouré de profondes douves.
Dès 1231, le mariage d’une des filles d’Eudon III, Alinéor de Porhoët, avec Alain V de Rohan, va faire passer le château de La Chèze dans la famille de ce dernier. Et il va très vite devenir la résidence ordinaire des vicomtes de Rohan. Aux XIVe et XVe siècles, il sera même considéré comme l’un des hauts lieux du pouvoir politique breton. De Jean Ier à Alain VIII, en passant par Alain IX et Jean II, de nombreux descendants de la famille des Rohan vont y installer leur chambre des comptes, y tenir leurs conseils et y rédiger de nombreux actes de pouvoir.
De l’âge d’or au déclin
C’est l’âge d’or du château de la Chèze. En 1461, c’est en grande pompe et en présence de nombreux grands seigneurs français et étrangers, qu’y sera célébré le mariage entre le futur Jean II (1) et Marie de Bretagne. Durant cette période, le château va faire l’objet de multiples réaménagements. Pour le moderniser et améliorer les conditions de vie, bien sûr. Mais aussi et surtout pour réparer les dégâts commis par les guerres et les sièges perpétrés par les Anglais pendant la guerre de Cent ans (1337-1453), ou encore pendant la guerre de succession de Bretagne (1341-1364).
À la fin du XVe, le château va toutefois sombrer dans un inexorable déclin. En 1479, Jean II est incarcéré à Nantes sur ordre du duc François II, pour l’assassinat de son beau-frère, Jean Kerardreux. La vicomtesse quitte alors La Chèze et le château n’est plus occupé que par des gens d’armes et un capitaine. Plusieurs autres facteurs vont également expliquer cette perte de puissance. Après les progrès de l’artillerie, le château devient plus vulnérable. Les dégâts provoqués par de nouveaux sièges dévastateurs, entre 1487 et 1495, deviennent difficiles à réparer. Les coûts étant devenus disproportionnés au regard de l’intérêt stratégique déclinant du site.
Au cours des siècles suivants, il sera toutefois encore le théâtre d’événements importants. En 1628, après la rébellion du duc de Rohan, passé au protestantisme, son château lui est confisqué sur ordre de Richelieu. Le château lui est rendu, dès l’année suivante, mais il n’abritera désormais plus qu’un gouverneur, puis un simple concierge. À l’heure de la Renaissance, l’époque n’est plus aux demeures militaires, froides, sombres et austères.
Les Rohan privilégient désormais Josselin et abandonnent La Chèze. En 1743, il est même vendu en carrière à la paroisse de Loudéac pour rebâtir une partie de son église. Initialement, seules les pierres déjà tombées dans les douves peuvent être utilisées ! Mais le château qui change alors de mains à de nombreuses reprises, devient en fait une véritable carrière dont les pierres se retrouvent à la fois dans les maisons de Loudéac, mais aussi de La Chèze.
Au XIXe siècle, les douves sont inscrites en « pâturage » sur le cadastre napoléonien et la haute cour semble avoir été investie et utilisée en partie pour la culture potagère.
(1) C’est le vicomte Jean II de Rohan qui fait construire le château de Pontivy, entre 1479 et 1503.
Blues au château : animations riment avec réhabilitation
Depuis le rachat des ruines par la mairie, en 1978, des chantiers de défrichement et quelques fouilles ont été réalisés sur le site du château de La Chèze. Il faudra toutefois attendre 2005 et la création de l’association pour la sauvegarde et l’animation du château, pour que s’esquisse un véritable projet de réhabilitation. Un an plus tard, l’association « Blues au château », donne encore un élan supplémentaire au projet. Les objectifs sont clairement affichés : « Il s’agit de faire la lumière sur le château et de relancer l’intérêt de la population et des collectivités. » Ces dernières s’investissent et le château est même inscrit au patrimoine complémentaire des Monuments historiques.
Très vite, les chantiers hebdomadaires initiés par les bénévoles permettent de sortir le site des ronces. Parallèlement, des études sur l’architecture ou la valorisation touristique sont lancées. Et chaque année, à la fin du mois d’août, le festival de blues attire de plus en plus d’amateurs. Du 18 au 21 août prochains, une quinzaine de concerts gratuits seront programmés pour le 10e anniversaire de la manifestation.
Depuis cet automne, le projet de sauvegarde est entré dans une nouvelle phase. Les travaux de mise en sécurité de la tour Nord-Est ont en effet été engagés en novembre et devraient se poursuivre jusqu’à la fin du printemps. Ensuite, des travaux de rénovation et de mise en valeur devraient être entrepris sous la direction de l’architecte Léo Goas.