« Coucou ». Comme elles sont douces les deux onomatopées avec lesquelles on prend plaisir à saluer un ou une ami(e). « Coucou ». Comme il est trompeur le joli nom du bel oiseau gris. Notre invité printanier est en effet tout, sauf sympa. Un bel enfoiré !
Coucou-coucou… Jusque dans son chant, c’est un escroc, le coucou que les spécialistes qui se la racontent un peu nomment « cuculus canorus ». Familier dès début avril dans les campagnes ou les jardins des villes, son cri est mélodieux, sonore et clair. Comme une invitation à une belle rencontre qui ne le sera pas… belle.
Car, à l’image de son auteur, son cri est une véritable escroquerie. Le chant est beau, l’oiseau pas vraiment. Bien au contraire…
Et là, on ne dit rien de son plumage, on qualifie juste sa façon d’être. Parce que question apparence, il n’est pas vilain. De la taille d’une tourterelle à l’allure de petit rapace, notre coucou gris mâle fait sobrement dans le blanc et le gris en s’accordant quelques rayures noires et des tons plus foncés pour sa longue queue, par ailleurs tachetée de blanc. On notera aussi que, pour une fois, c’est la femelle qui fait dans la fantaisie en agrémentant sa garde robe de brun ou de fauve. Mais rien de tape à l’œil non plus. Mâle et femelle restent discrets. Rien à voir avec les « sapeurs » de la gent volatile, dont certains, tel le martin pêcheur, osent jusqu’au fluo.
Connaissant un peu le coucou, on ne voit dans cette relative sobriété, qu’une ruse de plus pour abuser ses congénères. Si des enfants sont à vos côtés, s’ils peuvent poursuivre la lecture derrière votre épaule, écartez-les. Gentiment, mais écartez-les… Les lignes qui suivent sont à déconseiller aux âmes sensibles.
La scène commence pourtant galamment. Au printemps, le mâle attire la femelle avec son chant si engageant.
Il parade ensuite devant sa belle en étalant sa longue queue et en se balançant. Et avant de conclure, clou du numéro de charme, lui présente un brin d’herbe ou une petite branche. Peu importe alors qu’elle ait revêtu sa robe brune ou fauve… Vaincue par le charmeur au joli chant, elle succombe.
Assassin né !
Elle succombe et s’en va. Et lui fait de même. Mâle et femelle ne cohabitent en effet que durant la brève période de reproduction. Que chacun imagine suivie ou précédée de celle de nidification. Et bah non ! Pourquoi se gêner, hein ? Le coucou, mâle ou femelle, ne construit pas son nid.
Après avoir enlevé un des œufs déjà là, madame pond dans le nid d’une autre quand elle s’absente. Et attention, elle ne fait pas semblant : pendant la saison elle pond de 8 à 25 œufs, toujours dans le nid d’une autre, à raison d’un œuf par jour. Une vraie calamité !
Et la nature que l’on dit bien faite se fait ici perverse. Pour tromper l’occupante légitime du nid patiemment confectionné, l’œuf de l’insolente dame coucou prend l’apparence et la taille de ceux déjà déposés dans le nid. Une dizaine de jours plus tard le jeune intrus sort de l’œuf et commence, dès sa coquille brisée, son abominable besogne. Afin d’être nourri au mieux par ses parents adoptifs, il éjecte les autres œufs et les poussins hors du nid. À peine né et déjà assassin.
Désormais seul à la cantoche, il bénéficie d’un régime hyper vitaminé et grandit plus vite et plus fort que ses hôtes qu’il abandonne fourbus. Nourrir leur fausse progéniture représente en effet un énorme effort.
Voilà « la cruelle et douloureuse histoire », non des frères Dalton, comme la chantait le bon Joe Dassin… mais celle du coucou gris que l’on ne salue pas. Même si, pour se faire bien voir du jardinier, il boulotte allègrement les chenilles, notamment l’abominable et urticante
processionnaire.