Le ralentissement après l’embellie
Née dès la fin du premier confinement, l’embellie du marché de l’immobilier s’est poursuivie tout au long d’une année 2021, qualifiée d’exceptionnelle. L’attractivité des petites villes et des bassins ruraux du Centre Bretagne a séduit de nombreux acquéreurs venus d’autres régions françaises. Aujourd’hui, entre l’inflation et resserrement du crédit, les premiers signes d’un ralentissement semblent poindre.
Vers une stabilisation du marché
« Les arbres ne montent pas au ciel », aime à dire un professionnel de l’immobilier de la région pontivyenne. De fait après une année 2021 exceptionnelle, le marché de l’immobilier dans le Centre Bretagne, tend aujourd’hui à se stabiliser. Sans atteindre la frénésie des années 2003/2007, l’année passée avait en effet été exceptionnelle. Dans les Côtes d’Armor, le volume de transactions s’était ainsi envolé pour enregistrer une augmentation de près de 25 %. Plus modérée, l’augmentation du volume des transactions dans le Morbihan avait atteint près de 20 %. Dans le Centre Bretagne, la hausse est toutefois restée plus mesurée. « Ici, nous sommes toujours en décalage avec la bulle immobilière, explique Véronique Huitel, notaire à Loudéac. Elle arrive plus tard, elle monte moins haut et elle descend moins bas. » Depuis quelques mois, le volume des transactions tend à légèrement fléchir. « Il faudra attendre la rentrée pour confirmer, ou non, cette tendance », précise de son côté le conseil régional des notaires.
L’ancien plutôt que le neuf
L’ancien demeure le coeur du marché immobilier. Dans les Côtes d’Armor, 90 % des ventes portent sur des maisons anciennes ou sur des appartements. Dans le Morbihan, cette proportion atteint près de 80 % du marché. Dans les deux départements, le marché souffre d’un déficit d’offres. Si la côte bénéficie bien évidement d’un attrait qui ne se dément pas, tous les secteurs géographiques ont profité d’une demande soutenue. C’est notamment le cas du Centre Bretagne, dont l’attrait s’est notablement conforté. « Nous avons pu constater que des biens qui étaient en vente depuis très longtemps à des petits prix (30 000 à 40 000 €), et qui doivent généralement supporter des travaux, ont trouvé acquéreur », précise Véronique Huitel. La Bretagne intérieure offre aux acquéreurs des biens disposant d’espaces à des prix plus abordables que ceux pratiqués sur le littoral ou autour des villes. « Ici, les acquéreurs sont essentiellement des classes moyennes, à la recherche de maison, avec ou sans travaux, pour des budgets inférieurs à 150 000 € », explique Sylvie Le Mené, agent immobilier Capifrance, à Pontivy. Les petites villes qui offrent tous les services (commerce, collèges, médiathèque…), ont largement profité de cette demande renouvelée.
Des prix toujours en hausse
Le déséquilibre entre l’offre et la demande s’est accentué et a favorisé une tension sur les prix qui ont augmenté partout, quel que soit le type de bien, en 2021. Dans le Morbihan, le prix médian au m2 pour un appartement ancien, a ainsi progressé de 13 %, pour s’établir à près de 2 900 €. La hausse était encore plus importante dans les Côtes d’Armor, avec une augmentation de 17 %, pour un médian atteignant près de 1 900 €.
S’agissant des maisons anciennes, les hausses de prix ont également été importantes. Dans le Morbihan, elle s’est établie à environ 11 %, pour un prix médian de 220 000 €. Dans les Côtes d’Armor, la hausse a été de 8 % pour un prix médian de 157 000 €. Depuis le début de l’année 2022, la hausse s’est poursuivie avec une progression d’un peu plus de 7 % dans les Côtes-d’Armor et de 10 % pour le Morbihan. Toutefois, le conseil régional des notaires constate localement, depuis quelques mois, une stabilisation des prix.
Terrains à bâtir
Le terrain a longtemps été le type de bien privilégié par les primo-accédants car il permet de bénéficier d’aides et offre une meilleure maîtrise du budget que la rénovation. Plus de 40 % ont moins de 40 ans. Ils privilégient les bassins ruraux où ils peuvent trouver des terrains à moins de 30 000 € avec des surfaces plus importantes que sur le littoral ou dans les agglomérations. Position géographique de la commune et services qu’elle propose, expliquent les différences du prix au mètre carré qui oscillent de 10 € à plus de 70 €. Si certaines communes éprouvent des difficultés pour remplir leurs lotissements, d’autres profitent d’un marché porteur. Depuis quelques mois néanmoins, la hausse constante du prix des matériaux de construction s’est traduite par un ralentissement du nombre des projets et même à l’arrêt de certains, pourtant tout près d’être engagés.
Télétravail et « migrants climatiques »
Encore assez peu développé en France avant le premier confinement, le télétravail a depuis connu une explosion inédite. Selon le ministère du Travail, 25 % des Français (soit environ 5 millions de personnes) ont travaillé à distance pendant le confinement, contre à peine 7 % en 2017. Si au départ, certaines entreprises ont dû s’y convertir dans l’urgence (et même parfois dans la douleur…), cette révolution semble partie pour durer. L’association nationale des DRH prévoit en effet une montée en puissance du télétravail après la crise. « Nous avons appris à mieux travailler à distance et même les managers réticents ont pu se rendre compte que cela pouvait fonctionner », confie un représentant de l’association. Cette possibilité offerte par l’employeur a permis à certains de franchir le pas pour quitter les centres urbains. « Nous avons pu constater une augmentation des acquéreurs venant d’autres régions, explique Sylvie Le Mené. De Paris et de la région parisienne, bien sûr, mais également plus étonnement du sud de la France. Des « migrants climatiques » qui préfèrent fuir la multiplication des événements extrêmes. »
La pierre, une valeur sûre
Investir dans la pierre, c’est-à-dire placer son argent dans quelque chose de solide qui résiste malgré le temps qui passe, qu’on possède réellement et sur lequel on peut compter… Dans une période d’incertitude comme celle que nous vivons, la pierre s’impose encore plus clairement comme une valeur refuge. « Les stocks de biens s’épuisent, mais nous sentons un réel engouement pour les biens qui se vendent au juste prix », assure Valérie Huitel. Des taux d’intérêts qui augmentent, mais toujours inférieur à l’inflation, couplé à une défiance diffuse face aux produits financiers proposés par les banques, ne font qu’accentuer encore la valeur refuge de la pierre qui rassure les investisseurs.
Des taux de crédit plus bas que l’inflation
Après avoir connu des niveaux historiquement bas jusqu’à la fin de l’année 2021, les taux amorcent depuis quelques mois une ascension. Pour l’instant, ils demeurent raisonnables mais devraient continuer à augmenter. De plus, si on compare les taux d’emprunt à l’inflation que nous subissons actuellement, on constate que nous bénéficions d’un taux d’intérêt réel négatif. Pour autant, près de la moitié des demandes de prêt immobilier sont actuellement refusées à cause du taux d’usure, c’est-à-dire, le taux d’intérêt maximum légal que les établissements de crédit sont autorisés à pratiquer lorsqu’ils accordent un prêt.
Centre Bretagne, un eldorado ?
Pour habiter ou pour investir… L’immobilier du Centre Bretagne apparaît aujourd’hui très prisé. L’effet Covid est forcément avancé pour expliquer l’afflux important d’acquéreurs venant d’autres régions françaises. Mais ce n’est pas le seul. « Le Centre Bretagne est attractif, assure Sylvie Le Mené. La qualité de vie et la tranquillité attirent une population qui souhaite fuir les grandes agglomérations ».