En crottin, en bûchette ou en pyramide… Le fromage de chèvre du Gaec de ma Vallée, à Plouguenast, privilégie une fabrication traditionnelle au lait cru et sans OGM. Un engagement doublé d’une démarche d’agriculture et de développement durables.
« Faire du fromage de chèvre, c’est facile. Mais faire du bon fromage, c’est plus compliqué… Et faire du bon tout le temps, ça l’est encore plus. » À Plouguenast, au Gaec (1) de ma Vallée, voilà pourtant près de 40 ans qu’ils perpétuent cette exigence… Avec un réel succès.
Comme souvent, l’idée en revient à des hommes lassés du système productiviste et qui veulent pratiquer une agriculture autrement. Mais lorsqu’en 1976, Michel et Guy Rault, décident de se lancer dans la production de fromages de chèvre, en plein cœur du Centre Bretagne, leur initiative est forcément considérée comme une folie par les agriculteurs du pays. Qu’importe, ils se lancent dans l’aventure avec un maigre cheptel de chèvres de race alpine chamoisée.
Dès l’origine, et bien avant que la notion de développement durable ne soit à la mode, les concepteurs ont d’abord souhaité défendre à la fois une vison et des valeurs. « Ils voulaient prouver qu’on peut faire vivre des familles d’agriculteurs et de salariés avec des moyens de production raisonnables et un système d’exploitation cohérent », explique Pierre-Yves Tanniou, associé du Gaec.
« Conviction et bon sens »
Certes, en un peu moins de quatre décennies, l’exploitation s’est agrandie. Pour une superficie d’environ 70 hectares, le Gaec compte aujourd’hui 270 chèvres. Mais les valeurs initiales sont restées les mêmes. Et à toutes les étapes de la production. L’objectif est de fonctionner avec le maximum d’autonomie alimentaire et énergétique.
Côté alimentation, les chèvres sont exclusivement nourries avec des céréales (orge, maïs grain) et du fourrage produits sur l’exploitation. « Par conviction et par bon sens », l’ensemble de la production est bien évidemment réalisé en respectant des pratiques culturales bios. S’agissant de l’énergie, l’exploitation a banni les énergies fossiles ou nucléaires. Une chaudière à copeaux de bois assure ainsi le séchage du fourrage et des céréales. Elle permet également d’assurer le chauffage des bureaux et de la fromagerie, ainsi que des trois maisons d’habitation situées à proximité.
Économiquement et socialement, la plus value générée par la transformation sur place de la matière première permet de vivre et de travailler au pays. L’objectif a été atteint, au-delà des espérances. De nouveaux associés sont venus remplacer les fondateurs et des employés ont été embauchés. Aujourd’hui, avec trois associés et sept salariés, le Gaec de ma Vallée fait vivre une dizaine de personnes. Surtout, la nouvelle génération a su profiter de l’expérience de l’ancienne pour pérenniser une fabrication traditionnelle.
200 000 litres de lait par an
Et c’est bien évidemment à partir d’un lait cru que va être fabriqué un fromage au goût unique, lié au savoir-faire du fromager et « à la haute qualité fromagère du lait produit et des bactéries natives issues des bonnes pratiques de la ferme ».
Chaque année, plus de 200 000 litres de lait (une chèvre produit en moyenne 800 litres par an), sont ainsi transformés en une cinquantaine de tonnes de fromage. Tous les soirs, le lait de la traite est conservé dans un réservoir à une température de 10°. Le lendemain, il est réchauffé par la traite du matin pour atteindre 20°. Vient alors la phase de l’emprésurage. L’ajout d’enzymes va générer une fermentation lactique et favoriser la formation du caillé, pendant 24 heures.
Cette étape achevée, le caillé est déposé dans des moules perforés, afin qu’il puisse s’égoutter. Le ressuyage permet ensuite d’assécher la surface du fromage et favorise le développement de la flore recherchée, en limitant celui des bactéries et autres indésirables. Enfin, le salage va permettre de développer la saveur et de limiter le développement bactérien. Ici, pas de trempage dans une saumure, le salage se fait à sec en saupoudrant les surfaces du fromage.
Si certains seront consommés frais, d’autres poursuivront leur affinage pendant une période pouvant aller jusqu’à quatre mois. Mais tous, qu’ils soient natures, cendrés, aromatisés aux herbes, à la ciboulette ou encore aux fruits secs, se retrouveront sur les étals des crémiers de la région ou dans les rayons des grandes et moyennes surfaces. Ce sera alors au consommateur de faire son choix, parmi une gamme de fromages de chèvre fermiers, qui compte tout de même près d’une trentaine de références.
(1) Gaec : groupement agricole d’exploitation en commun.