Notre ami de ce début d’année est une sorte de roi, le seigneur incontesté des rongeurs arboricoles de nos bois et forêts. À l’instar du roi Henri, il nous invite à rallier son joli panache. Le sien n’est pas blanc mais, le plus souvent, roux. Et ça lui va sacrément bien.
Il a vraiment tout pour lui, le gentil écureuil. Dame Nature n’a pas fait semblant de le chouchouter. En invitant les plus gentilles fées à se pencher sur son joli nid suspendu, elle lui a tout donné : élégance, grâce, agilité… Jusqu’à cette superbe queue en panache qui n’en finit pas d’accentuer la beauté de sa gracieuse silhouette. On imagine sans peine le chœur des moins bien nantis de la faune voisine, crapauds, putois ou grosses araignées par exemple… toute une bande de frustrés hurlant leur jalousie à la lune tels une troupe de Calimero : « C’est pôôô juuuusssteeee ! »
Pas vraiment équitable en effet. Tout pour l’écureuil ; beaucoup moins, et parfois si peu pour les autres. Rien d’étonnant donc à ce que le superbe petit écureuil attire la sympathie de tout un chacun, comme l’aimant la limaille de fer. Aguicheur de naissance, le petit chouchou pousse en hiver la coquetterie jusqu’à enjoliver son pelage de saison d’une sorte d’accroche-coeur sur la pointe de ses adorables petites oreilles. Un petit pinceau de poils bien visible qui en souligne toute la finesse pourtant déjà naturellement mâtinée de délicatesse.
La beauté incarnée
Le tout sans jamais en faire trop. Le bel écureuil ne compose pas, il ne triche pas, ne fait pas semblant, ni exprès : il est beau, simplement, naturellement beau. C’est comme ça. Il n’y peut rien. C’est sa destinée. Le concernant, les goûts et les couleurs des coureurs de bois qui ont la chance de le croiser sont, pour une fois, unanimes : « Qu’est-ce qu’il est beau ! Et comme le roux lui va bien. »
Sinon, qu’on le veuille ou pas, impossible de ne pas s’attarder encore un peu sur ce sans quoi notre écureuil perdrait beaucoup de son immense charme naturel. Sa superbe queue en panache, évidemment. À côté de laquelle le casoar des Saint-Cyriens prête à sourire, sinon à s’esclaffer. Leur plumet ne tient pas la comparaison face à cet admirable attribut, aussi long que le reste du corps auquel il donne une légèreté qui confine à la poésie.
Qu’il la traîne derrière lui au ras du sol, que sa pointe ébouriffée soit légèrement relevée ou qu’il l’arbore fièrement, lovée sur le dos, en forme de point d’interrogation dessiné par un graphiste touché par la grâce, la queue de l’écureuil séduit. Grâce à elle, il emballe grave. Il est irrésistible comme en témoignent, unanimes eux aussi, les visiteurs des parcs et jardins auxquels le gentil écureuil accorde parfois le privilège de venir grappiller une noisette dans une de leurs mains tendues d’espoir.« C’est vraiment trop bien » résume admirablement un jeune chanceux.
« De près, il est encore plus beau », ajoute le même frappé, comme Carl Von Linné en 1758, par l’importance et la classe naturelle du panache. Le naturaliste suédois classa en effet notre petit rouquin dans la famille des sciuridés et le genre scirius, nom dérivé du grec ancien « skiouros » signifiant « dont la queue fait de l’ombre ».
Déjà, il avait noté combien l’admirable parasol fait de l’ombre à la beauté de tous ceux ou celles qui l’approchent. On ne rivalise pas avec tant de grâce et d’élégance. C’est peut-être ce qu’a voulu signifier l’inconnu ayant trouvé à son propos la jolie formule : « L’écureuil a beau être petit, il n’est pas esclave de l’éléphant ».