LES COUPS DE COEUR de LA LIBRAIRIE « RENDEZ-VOUS N’IMPORTE OÙ »
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Il y a Varosha, la station balnéaire chypriote jadis en vogue, devenue ville fantôme entourée de barbelés. Il y a Ariana, jeune chypriote grecque qui se cherche, sous le poids des souvenirs et des non-dits familiaux. Il y a cette écrivaine étrangère qui voudrait écrire sur Chypre mais peine à cerner son sujet, à trouver ses mots, à apprivoiser cette île. Il y a le « café de la ville perdue », où les deux femmes vont se rencontrer et s’aider, la première à comprendre son histoire familiale et, qui sait ? S’en libérer ; la seconde à pénétrer dans l’intimité de l’île et à coucher son récit sur le papier. Il y a la tragique histoire de Chypre, qui nous parle de guerre, de haine, d’amour, de drames et de destinées brisées. Un livre haletant et magnifique !
Après « Giant » et « Bootblack », Mikaël revient avec un nouveau diptyque consacré à New-York. Comme l’indique le titre, il sera cette fois consacré au quartier de Harlem, en 1931. Dans cette période de fin de prohibition, nous suivons les pas de Stéphanie Saint-Clair, qui fut aussi appelée Queenie car elle était la marraine de Harlem. Femme, noire, francophone, elle fut sans cesse la proie d’hommes, de blancs. Comme Harlem. Mikaël a su imposer, albums après albums, son style fort détaillé aux couleurs sombres et chaudes.
L’auteur de « Norman n’a pas de super-pouvoir », légitimement multi primé, revient avec son deuxième roman jeunesse. LX18 est un garçon de 16 ans qui a subi un traitement génétique et hormonal afin d’en faire un super soldat dénué de toute émotion, dans un pays en guerre depuis plus de 60 ans. Il fait partie de ce qu’on appelle les Altérés. Une fois la paix revenue, ces adolescents sont réinsérés dans la vie civile ; notre héros LX18 arrive dans un lycée. La tenue de son journal sert de prétexte à Kamel Benaouda pour traquer nos travers, les défauts de notre époque (et de nos ados !) mais aussi à porter un regard tendre sur l’humanité.
Elles sont cinq : Paloma, Céleste, Sierra, Apolline et Chélonia. À chacune lui sera consacré un tome de cette série. Ces adolescentes atypiques ont toutes du mal à s’intégrer au lycée, à la vie. Elles décident de s’unir. Portée par un dessin proche du manga et une colorisation qui change de palette selon l’humeur de Céleste. Nous ne perdons pas de vue Paloma, sur laquelle le premier tome s’était plus particulièrement penché et continuons de nous attacher à ces fille du club des mal-barrées, comme elles se nomment elles-mêmes !
Philippe Besson nous invite à prendre un des rares trains de nuit qui reste, ce Paris-Briançon du titre, à la rencontre de passagers montés à bord pour des raisons toutes aussi diverses qu’eux-mêmes le sont. Il nous les présente, s’attardant particulièrement sur ce commercial usé, cette mère de famille en pleine séparation, ce hockeyeur qui doute, ce médecin qui ne semble pas affecté par la mort de sa mère, ce groupe de jeunes, ce couple de retraités et même un certain Giovanni Messina dont, en effet, on reparlera plus tard, comme promis. Certains d’entre eux mourront avant la fin du voyage, c’est écrit dès le début. Est-ce une sorte de crime de l’Orient-Express ? L’ambiance nocturne et le huis-clos s’y prête… Mais ce roman s’attache davantage à cette étonnante galerie de personnages, Philippe Besson s’ingéniant à faire ressortir de chacun d’eux une humanité à la fois tendre et fragile.
Les mots auraient-ils un sexe ? En tous cas, il est certain que leur genre fait sens ! Cet imagier malin, aux illustrations pleines de peps, permet à tous et à tout âge de dépasser les préjugés que la langue façonne… On s’y rendra compte notamment que des noms masculins qui désignent des personnes se mettent à désigner… des objets quand ils sont féminisés ! Si le jardinier est parfois poète, la jardinière n’est qu’un pot de fleurs ; le mandarin jouit d’une certaine aura, quand la mandarine se pèle et se mange… Des exemples colorés qui permettent d’ouvrir les yeux sur ce qui disent les mots, sur les représentations implicites du langage, un album édifiant et drôle soutenu par Amnesty International, pour tous à partir de cinq ans.